Economie, écologie: faut-il renoncer à la croissance?
L’université populaire d’Arcueil organisait une conférence le 5 décembre 2011 sur ce thème avec la présence de Jean-Marie Harribey, économiste , ancien président d’Attac.
Jean-Marie Harribey, décembre 2011
Résumé :
Dans le cadre d’une carte blanche donnée à Henri Sterdyniack, co-fondateur du collectif des « économistes atterés », qui a rappelé la contradiction dans laquelle nous sommes aujourd’hui (besoin de croissance pour sortir de la crise et perception des limites de la croissance comme modèle de développement), Jean-Marie Harribey a plaidé pour une pensée muldimensionnelle de la crise (écologique, sociale, économique etc.) et donc une pensée multidimensionnelle des transitions à faire pour changer de modèle.
Il a pris à cet égard l’exemple de la « côtelette de porc » achetée peu chère car produite par une industrie agro-alimentaire spécialisée qui n’internalise pas les externalités négatives de sa production (algues vertes, problématiques sanitaires, pollutions de l’air etc.), lesquelles sont prises en charge par la collectivité. Cet exemple montre d’après lui qu’en l’absence d’internalisation - dans le prix - des coûts réels de la production, le pari d’une soutenabilité « faible » c’est-à-dire produite par les avancées technologiques des process industriels ne résoud pas le problème de fond du système capitaliste productiviste. Se pose donc là la question de l’intervention de la puissance publique.
Il a rappelé à ce titre les logiques du développement durable néées avec le rapport Bruntland, celles du capitalisme « vert » plus récentes qui parlent d’un new deal vert ou celles de la décroissance pour proposer, à son tour, de « repenser le développement ». Pour éviter la contradiction paralysante de l’économie contre l’écologie ou du social contre l’écologie (cf. rejet de la taxe carbone au nom de la défense du modèle social mis en négociation par les industriels), il propose de repenser la conception de la richesse, de démarchandiser certaines activités (dont éducation, protection sociale etc.), pour arriver à un modèle « social et écologique » aux antipodes du productivisme. Ce but ne pourrait être atteint qu’avec des scenarii de transition sur plusieurs décennies, comme le montre l’exemple du scenario Negawatt pour l’énergie.
Pas de décroissance brutale donc, mais au contraire le besoin d’affecter les marges de manoeuvres budgétaires issues des gains de productivité vers les modèles de transition. Il y a donc des arbitrages démocratiques à réaliser sur les secteurs qui devront être soutenus au détriment d’autres pour assurer la réalisation de la transition. Pour lui, et c’est un des exemples, « l’agriculture productiviste doit diminuer au profit d’une agriculture écologique ou biologique ». Il s’agit là d’une « bataille politique qui n’est pas perdue d’avance » tant les attentes sociales sont fortes sur ce domaine. Pas de révolution donc car les révolutions ont échoué précisément car elles n’ont pas pensé les transitions, le point crucial de la transformation.
Sources :
Site de la FNAB www.fnab.org